Tout, sauf une fissure de plus. Alors que le phénomène de corrosion sous contrainte empoisonne la vie d’EDF depuis octobre 2021, le problème identifié fin février – révélé mardi 7 mars par le site Contexte – sur un réacteur de Penly (Seine-Maritime) pourrait marquer un tournant dans cette affaire et mettre encore un peu plus l’électricien en difficulté. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a immédiatement ordonné à EDF de “révisez votre stratégie”.
Des traces de corrosion sous contrainte – c’est-à-dire de corrosion causée par l’action conjuguée de contraintes mécaniques et d’un environnement agressif – avaient été détectées dès janvier 2022 sur l’unité numéro un de Penly.
La fissure repérée un an plus tard sur le circuit d’injection de sécurité du même réacteur diffère cependant beaucoup de la précédente, et de celles observées dans d’autres centrales. Par sa taille, d’abord : il a une profondeur maximale de 23 millimètres (mm), pour une épaisseur de tuyau de 27 mm. « C’est une très grande taille ; quand il ne reste plus que 4 mm, c’est un problème ! », a insisté le président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), Bernard Doroszczuk, lors d’une audition devant la commission des affaires économiques du Sénat, mardi 7 mars.
A l’intérieur de cette canalisation circule de l’eau faiblement radioactive, qui refroidit le cœur du réacteur. “En cas de rupture, cette eau s’écoulerait dans le bâtiment réacteur mais cela n’aurait aucune conséquence à l’extérieur, puisque l’enceinte de confinement protège des rejets dans l’environnement”déclare Karine Herviou, directrice générale adjointe de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) – organisme que le gouvernement souhaite fusionner avec l’ASN.
« Zone sensible »
Ensuite, la nouvelle fissure de Penly ne s’explique pas non plus de la même manière que les précédentes. Jusqu’à présent, c’était la “conception” ou la “géométrie” des conduites qui étaient impliquées dans le phénomène de corrosion : des “contraintes” étaient générées dans les conduites longues avec de nombreuses sections horizontales, mais pas dans les courtes. Cela explique que les réacteurs les plus récents du parc – qui sont aussi les plus puissants – aient été les plus touchés, leur conception étant différente de celle des tranches plus anciennes. C’est sur la base de ce constat qu’EDF a mis en place une stratégie consistant à « prioriser » les zones jugées plus sensibles à ce risque de corrosion, à inspecter en priorité sur seize réacteurs.
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