Quatre braquages de supermarchés à Périgueux et son agglomération entre le 22 et le 27 août 2022 ; 4.800 euros extorqués avec une arme de poing, une semaine de harcèlement et un suspect quinquagénaire accro au crack qui se reconnaît en garde à vue “ayant braqué pour acheter la cocaïne dont il a besoin pour la fabriquer”explique son avocat, M.e Célia Borel. Fin août, préoccupés par les incendies à répétition dans la forêt voisine de La Double, à l’ouest de la Dordogne, les habitants découvrent avec effroi que leur ville de 30 000 habitants, “moyenne” par excellence, est plus à l’abri d’un phénomène qu’ils croyaient jusque-là réservée aux grandes métropoles, Paris en tête avec sa fameuse « colline du crack », au 18e arrondissement.
A Périgueux aussi, “le crack est à la mode”comme l’a dit l’un des suspects de trafic de cocaïne, cité en comparution immédiate devant le tribunal correctionnel de la ville, début février 2023. Certes, il n’y a toujours pas “les galets en circulation comme on en voit à Paris”, tient à le rappeler le procureur de la République, Solène Belaouar. Mais cela n’empêche pas le développement de la fissure. A défaut de trouver du « prêt-à-manger », les usagers du Périgord se consolent avec “à base de cocaïne”, selon la formule, une sorte de crack maison, cuit et fumé sur place. Le phénomène est présent à Périgueux et dans d’autres villes de même taille, comme Alençon, dans l’Orne, ou Lorient, dans le Morbihan.
Un gramme de cocaïne écrasé dans une cuillère à soupe, un trait d’ammoniaque ou de bicarbonate de soude, un réchaud : le crack est bricolé avec un minimum de matériel et fumé avec des pipes à eau que l’on peut se procurer au centre local d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues (Caarud). Par réduction des risques, on entend prévenir les risques de contamination des toxicomanes par les hépatites B et C. Tous les jeudis, en fin d’après-midi, plusieurs dizaines de personnes traînent au pied du camion équipé Caarud, sur le parking du ville de Périgueux, pour fournir “kits de base”, composé d’un tuyau propre, de deux embouts personnels et d’un filtre prêt à l’emploi. En échange du kit, chaque destinataire laisse un nom, ou plutôt un surnom. « On note le nombre de kits distribués pour chaque, explique Chloé Ducret, éducatrice spécialisée à l’antenne périgourdine du Comité d’étude et d’information sur les médicaments (CEID). Certains le prennent pour eux, d’autres le prennent pour les autres. Nous pouvons distribuer une cinquantaine de kits par soirée. »
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