A la pharmacie Alliance de Grenoble, Christine Le Fournier, 67 ans, ne cache pas son enthousiasme. “J’ai regardé les nouvelles missions arriver avec émerveillement. C’est une très belle reconnaissance de notre rôle et de notre utilité en santé publique.se réjouit le pharmacien. Notre métier tendait à s’éloigner de celui de gardien pour devenir essentiellement marchand. »
Implantée depuis trente-cinq ans dans le quartier des Capuche-Alliés, à 2 kilomètres du cœur historique de la ville, elle a pris ” de front “ ces nouvelles attributions du pharmacien. « Nos équipes ont été formées à la vaccination, au dépistage et à la conduite d’entretiens pharmaceutiques. Nous nous sommes également coordonnés avec les autres professionnels de santé de la région, médecins, infirmières, sages-femmes, pour travailler en harmonie »elle explique.
Son officine est aujourd’hui l’une des rares officines de France – environ 1 500 à ce jour sur les 21 000 du territoire – à avoir mis en place des entretiens pour les femmes enceintes. Ces échanges, destinés à sensibiliser les futures mamans au risque lié à la consommation de substances tératogènes pendant la grossesse, sont pratiqués depuis longtemps par les pharmaciens. Mais jusqu’à présent, elles se déroulaient au comptoir, de manière informelle.
Depuis le 7 novembre 2022, ils sont reconnus comme des actes à part entière, encadrés par une feuille de route détaillée, et rémunérés par l’Assurance-maladie sous forme d’honoraires. Ils font partie du lot de nouvelles missions de santé progressivement confiées aux pharmaciens ces dernières années. Le salon de la pharmacie Pharmagora, qui s’est tenu du 11 au 12 mars à Paris, a été l’occasion pour la profession de dresser un premier bilan du déploiement de ces missions.
Nouveau mode de rémunération
Le début de ce changement a pris racine au cours de la dernière décennie. Face à la baisse des prix des médicaments, les pharmaciens s’inquiètent pour l’avenir de leur officine. Car leurs chiffres d’affaires sont, à cette époque, liés, leur rémunération basée sur un pourcentage du prix de la boîte de médicaments vendue. « A chaque fois qu’on conseillait à un patient de ne prendre qu’une boîte au lieu de quatre, on se tirait une balle dans le pied. Nous ne nous considérions plus crédibles.rappelle Pierre-Olivier Variot, président du Syndicat des pharmaciens d’officine.
Face à l’impasse économique qui se profile, la profession monte au créneau. Avec les pouvoirs publics, une réflexion est menée pour trouver un nouveau modèle économique. “Nous n’avions que deux solutions pour en sortir : passer au paiement à l’acte, comme tous les professionnels de santé, ou nous modeler sur le modèle anglo-saxon et devenir gérants de supermarchés du médicament”, explique Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France. Réticent à être réduit à simple “marchands de boîtes”les pharmaciens optent pour le premier.
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