Destruction de bidonvilles et expulsion d’étrangers : l’opération risquée de Gérald Darmanin à Mayotte

Cela pourrait être l’un des marqueurs de son futur record au ministère de l’Intérieur : Gérald Darmanin a promis à Mayotte un “action spectaculaire” destruction de bidonvilles et expulsion de leurs résidents illégaux. L’opération, très attendue par les élus du département, doit être déployée dès la fin du ramadan le 21 avril, pour environ deux mois, jusqu’en juin. Les conditions de sa préparation montrent qu’il ne sera pas sans risque.

Le préfet, Thierry Suquet, est chargé d’une triple mission. Premièrement, la lutte contre le séjour irrégulier qui suscite de vives tensions sociales à Mayotte, avec l’idée de passer de 80 interpellations d’étrangers par jour actuellement à 250-280 – la majorité des expulsés seront ramenés par la mer à Anjouan, aux Comores voisines.

Puis le “déballage”, démantèlement des quartiers informels – 8 maires soutiennent le plan et se disent prêts pour l’opération qui viserait 5 000 personnes dans 1 000 « bangas », soit 10 % des baraques en tôle recouvrant les collines de Mayotte. La moitié des 310 000 résidents enregistrés de l’île vivent dans ces colonies illégales.

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Enfin, il s’agira d’interpeller de jeunes délinquants violents, dont beaucoup déjà connus des services de police, qui font régner une insécurité aiguë sur l’île.

Un décapage par mois

Les services de l’Etat n’auront pas eu beaucoup de temps pour se préparer. Pensée depuis l’automne 2022 mais validée le 31 janvier par le président de la République en Conseil de défense, l’opération initiale présentée par la place Beauvau devait être revue pour mieux prendre en compte la situation des enfants mineurs d’étrangers, selon les informations de Monde que le ministère refuse de commenter.

Les habitants observent les maisons préfabriquées louées par la préfecture où elles doivent être relogées après la démolition de la

L’objectif reste de marquer les esprits, dans un contexte d’examen de la loi sur l’immigration et de surenchère du Rassemblement national sur ce sujet à Mayotte. Des renforts des forces de l’ordre sans précédent sont attendus – leur nombre sur le territoire a déjà augmenté de 40 % depuis 2018 et le premier plan, baptisé Shikandra, alors lancé contre l’immigration clandestine. Le nombre de gendarmes va doubler, pour atteindre 1 050 militaires. Et 120 policiers supplémentaires sont prévus (820 au total), dont 10 officiers de police judiciaire. Plusieurs sources évoquent toutefois un manque de moyens qui a contraint le ministère à réduire ses ambitions.

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Le préfet applique la loi Elan de 2018 qui facilite, par dérogation à Mayotte, l’expulsion des occupants des terrains sans droits ni titres. Mais avant cela, il doit fixer un périmètre d’action précis et pouvoir invoquer « risques graves pour la santé, la sécurité ou la tranquillité publique ». Afin d’établir la liste des personnes concernées, l’Etat doit également proposer un relogement ou un hébergement d’urgence. Autant de prérequis entravés par la faiblesse des services publics et sociaux de l’île.

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