Devant l’ambassade de Côte d’Ivoire à Tunis, Dorothée, 27 ans, attend avec sa fille de 2,5 ans sur le dos. Comme plus d’une centaine d’Ivoiriens, elle est venue s’inscrire au rapatriement volontaire. « Mon propriétaire m’a donné une semaine pour quitter la maison. Des amis à moi ont dû partir encore plus précipitamment. Je ne sais pas où aller, ça me rend malade ce qui se passe.” confie la jeune maman en situation illégale, poussée au départ.
Jeudi 23 février, deux jours après le discours du président tunisien Kaïs Saïed sur la “des hordes d’immigrants illégaux”source, selon lui, “de violences, de crimes et d’actes inacceptables”Dorothée a été licenciée de son travail de femme de ménage.
Le lendemain, la mission diplomatique ivoirienne lance une vaste opération de recensement de ses ressortissants « souhaitant quitter définitivement la Tunisie ». Une démarche d’autant plus urgente que les autorités tunisiennes ont accru la pression sur les Subsahariens, malgré la manifestation contre le racisme qui a réuni samedi un millier de personnes à Tunis, et des protestations venues de l’étranger.
Les associations tunisiennes et subsahariennes ont enregistré de nombreux cas de migrants expulsés de chez eux ces dernières semaines. Des expulsions précipitées par la stricte application d’une loi de 2004 qui oblige, sous peine de sanction, les propriétaires à demander un titre de séjour et à signaler au commissariat qu’ils hébergent un étranger.
durcissement net
Cette loi, comme le Code du travail, était jusqu’à présent très peu respectée en Tunisie. “C’est un problème depuis longtemps car le titre de séjour est très difficile à obtenir en Tunisie en général”, rappelle Alaa Talbi, directeur de l’ONG Le Forum tunisien des droits économiques et sociaux. Plusieurs Ivoiriens qui attendent devant leur ambassade le confirment : ils vivent depuis trois ou quatre ans dans leur logement sans jamais être inquiétés. “J’ai l’impression que la population est contre nous, donc ça ne sert à rien de rester” témoigne Ricoster, un Ivoirien de 26 ans.
Du côté des autorités, le durcissement est net, revendiqué. Les Tunisiens qui ne respectent pas la loi sur l’hébergement d’un étranger sont passibles de quinze jours de prison et d’une amende, a indiqué jeudi le porte-parole du tribunal de Sfax dans un communiqué. De sévères sanctions sont également prévues pour l’employeur qui embauche un étranger sans contrat de travail, a ajouté le lendemain, le porte-parole de la Garde nationale tunisienne, Houssem Jebali, dans un communiqué télévisé.
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