La chef d’orchestre et de chœur Laurence Equilbey fête les 30 ans d’Accentus, l’un des meilleurs ensembles vocaux au monde

Il n’est pas étonnant que le film “Tar” mentionne au passage le nom de Laurence Equilbey : chef d’orchestre (et choeur) de renommée mondiale, loin de l’image d’une star de la baguette occupée à parcourir le monde.

Si Laurence Equilbey a souvent été invitée à diriger à l’international, la Française de 61 ans est surtout fière d’Accentus, qu’elle a fondé en 1991 et qui est devenu l’un des meilleurs ensembles vocaux au monde, ou d’Insula Orchestra qui, depuis 2012, joue des instruments d’époque tout en proposant des concerts sur scène ou en réalité virtuelle. “J’accepte quatre à cinq invitations par an, car je préfère construire des choses plus liées au territoire et prendre du temps», confie-t-elle à l’AFP.

Des initiatives pour rejoindre les jeunes

A travers Accentus, qui fête ses 30 ans – avec deux ans de retard dû au Covid -, elle a redécouvert le répertoire a cappella tout en collaborant avec des compositeurs contemporains comme Pascal Dusapin ou Philippe Manoury. L’ensemble, composé de 32 chanteurs professionnels, fut surtout le premier chœur de chambre français à devenir professionnel. “On a un peu renversé des montagnes pour en arriver là car, en France, on avait tendance à dire qu’il n’était pas nécessaire d’être professionnel pour chanter dans une chorale, ce qui est faux pour certains répertoires», explique le chef, qui a également créé le département des jeunes chanteurs au Conservatoire de Paris.

Formée au Conservatoire dans la classe de la compositrice Betsy Jolas, elle étudie également la direction d’orchestre à Vienne avec le maître Nikolaus Harnoncourt et à Stockholm avec le grand chef de chœur Eric Ericson. Avec Insula Orchestra, en résidence depuis 2017 à la Seine Musicale (Boulogne-Billancourt, ouest de Paris), elle ne se contente pas de programmer son répertoire de prédilection – de Bach à Mozart – mais multiplie les initiatives depuis une décennie pour essayez d’atteindre un public qui goûte rarement la musique classique, en particulier les jeunes. “L’époque est très visuelle, il faut donc être dynamique dans le numérique, tant pour l’artistique que pour la transmission” précise Laurence Equilbey.

Concerts immersifs

Elle expérimente ainsi les concerts scéniques, comme celui saisissant du circassien Yoann Bourgeois, avec des acrobates virevoltant sur le Requiem de Mozart. Avec Mozart 360 Et Beethoven360, ses équipes ont créé des vidéos de concerts immersives : grâce au son 3D et à un casque de réalité virtuelle, vous pouvez écouter la musique comme les différents instrumentistes l’entendent et voir l’orchestre jouer à 360 degrés. En 2024, un nouveau projet phare verra le jour, le Guerres de Beethoven, en collaboration avec le cinéaste Antonin Baudry : il s’agit d’un concert-spectacle sur la musique de Beethoven, doublé d’une expérience cinématographique immersive dont les vedettes seront… le manga. “Essayez de sortir de votre zone de confort», commente Laurence Equilbey.

Insula Orchestra réalise également de nombreuses web-séries ou clips à but pédagogique pour expliquer par exemple la différence entre instruments d’époque et instruments modernes ou quand applaudir lors d’un concert. Infatigable, Laurence Equilbey lancera prochainement La Documenta.eu, une plateforme sur laquelle de grands ensembles européens jouant des instruments d’époque partagent leurs recherches. En disant “touché” à citer parmi la liste des chefs d’orchestre célèbres du film Le goudron, où joue Cate Blanchett, elle constate que les orchestres en France embauchent de plus en plus de femmes sur les podiums. Mais, précise-t-elle, les salles doivent les inviter davantage, car la proportion de chefs programmés en France reste décevante : 6 %.

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