Plantes génétiquement modifiées : la piste du greffage

Associer l’une des techniques de modification de l’ADN les plus avancées à l’une des plus anciennes méthodes de manipulation des plantes, le greffage : c’est l’idée présentée le 2 janvier dans la revue Biotechnologie naturelle par une équipe du Max Planck Institute for Molecular Plant Physiology de Potsdam (Allemagne). Friedrich Kragler et ses collègues décrivent comment ils ont utilisé Crispr-Cas9, un outil d’édition du génome “nobel” de 2020, pour modifier l’arabette, une plante modèle, avant de lui greffer une tige. sauvage », non modifié. Ils ont ensuite découvert que certaines des graines produites par la greffe portaient les modifications génétiques souhaitées.

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“Le fait qu’un message aille des racines aux fleurs est fascinant en soi”, note Friedrich Kragler, qui travaille depuis vingt ans sur la mobilité des acides ribonucléiques (ARN) chez les plantes. Les ARN sont des molécules clés, notamment dans le transport, la régulation et la traduction de l’information génétique portée par l’ADN dans les cellules et entre les tissus. Chez les plantes, leur circulation à longue distance passe par le phloème, un système vasculaire utilisé par la sève, mais aussi par des virus porteurs d’une conformation moléculaire proche des acides ribonucléiques de transfert (ARNt) – on parle de “séquences de type ARNt”ou TLS.

En 2016, l’équipe de Potsdam a montré que les structures de type TLS permettent le transport à longue distance des molécules d’ARN, d’un côté à l’autre du tissu végétal greffé. “L’idée nous est alors venue d’utiliser cette technique pour fabriquer des organismes génétiquement modifiés”dit Friedrich Kragler, qui rappelle que le greffage est utilisé depuis des millénaires − et pas seulement dans la vigne, pour la sauver du puceron phylloxéra, mais aussi sur de nombreux arbres fruitiers.

Saint Graal de la sélection variétale…

Rentrons dans le détail de la « cuisine moléculaire » de l’équipe allemande. Elle a d’abord modifié génétiquement l’arabis pour qu’il synthétise des molécules destinées remplir trois fonctions : transporter ces molécules des racines vers les feuilles et les fleurs grâce au passeport constitué par le TLS ; couper l’ADN des cellules de la partie aérienne de la plante à l’aide de la protéine Cas9 ; et insérer une information génétique portée par un ARN servant de guide. Restait à savoir si cette molécule produite dans le porte-greffe transgénique allait bien circuler et s’exprimer dans le greffon « naturel ». C’est ce qui a été observé, peu fréquemment, y compris lorsqu’une plante apparentée, le colza, a été greffée sur la racine de la betterave arabique.

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