BERTRAND-GUAY / AFP
Du CMP à la motion de censure en passant par le 49.3 : la semaine de tous les risques pour le gouvernement (photo d’illustration d’Elisabeth Borne et Olivier Dussopt à l’Assemblée prise le 28 février 2023)
POLITIQUE – ” Décisif : se dit d’un moment, le moment où se décident des événements importants. Cette définition de Larousse n’est pas galvaudée pour qualifier la semaine qui attend le gouvernement. Les prochains jours seront décisifs pour la très contestée réforme des retraites, après l’approbation attendue du Sénat.
Telle une veillée d’armes, Elisabeth Borne a réuni plusieurs ministres à la pointe du texte, ce dimanche 11 mars en fin d’après-midi. Un conseil pour préparer les prochaines étapes », selon Matignon. Et ” travailler pour soutenir la recherche d’un consensus », selon les mots du porte-parole du gouvernement Olivier Véran à sa fin.
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Si les astres s’alignent pour l’exécutif, le projet phare d’Emmanuel Macron sera voté jeudi 17 mars. D’ici là, le parcours législatif, semé d’embûches depuis le premier jour, promet encore de belles sueurs froides dans le camp présidentiel. D’ailleurs, à l’heure où les spectres d’un 49.3 et d’une motion de censure resurgissent.
Difficultés crescendo
Les difficultés vont, en effet, aller crescendo. La commission mixte paritaire, conclave parlementaire méconnu du grand public, se réunira mercredi, à huis clos, dans une salle de l’Assemblée nationale, parallèlement à une nouvelle mobilisation sociale. Bref, 7 sénateurs et 7 députés, choisis en fonction de la taille des groupes politiques dans les différentes chambres, vont négocier pour trouver des compromis et aboutir à un texte final.
Sauf grosse surprise, la commission devrait être « concluant » puisque les promoteurs de la réforme (Renaissance, MoDem et LR) y sont assez largement majoritaires (9 élus sur 14). Si la fumée est blanche, le texte part alors pour un tour rapide au Sénat puis à l’Assemblée. Le vote devrait, à nouveau, être une formalité à la Chambre haute, jeudi matin… pour se transformer en contestation à la Chambre basse.
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C’est en effet avec le retour au Palais Bourbon, jeudi après-midi, que les choses vont se corser pour le gouvernement. Pour cause : il n’est pas certain, à l’heure actuelle, que l’exécutif puisse compter sur une majorité de voix.
Selon les calculs de l’AFP, 30 à 35 députés LR envisagent de voter pour le texte, une quinzaine pour s’y opposer et une dizaine pour s’abstenir. Dans la majorité, où l’entente n’est pas toujours au beau fixe entre les différents groupes, une dizaine d’élus pourraient opter pour l’abstention. Ce qui, selon les ajouts, pourrait fixer le nombre de partisans du texte autour de 280, quand 289 sont nécessaires pour obtenir une majorité.
Le spectre tenace du 49.3
On comprend donc que les calculateurs sont de sortie dans le camp présidentiel pour convaincre les députés républicains réticents de voter le texte et ainsi éviter l’option d’un 49.3, forcément difficile à assumer. L’hypothèse inflammable est apparemment dans tous les esprits, en ce début de semaine cruciale.
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Plusieurs acteurs de la réforme se sont longuement exprimés dimanche, notamment dans le JDD, dire tout le mal qu’ils pensent de cette procédure, même dans la majorité. Ce serait ” fou et dangereux », a par exemple tonné le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger dans les colonnes de l’hebdomadaire, lorsque François Bayrou, le président du MoDem évoquait, quelques heures plus tard auprès de RTL, LCI et le Figaro, des arguments « très fort contre 49,3, même si“il y a peu de marges” réunir suffisamment de députés.
” Une motion de censure va être déposée et cette fois elle a de bonnes chances d’être adoptée »
Aurélien Taché, député EELV sur BFMTV
L’hypothèse n’est pas privilégiée par le gouvernement, a confirmé Olivier Véran, dimanche soir en quittant Matignon. Mais ce n’est pas exclu non plus. ” Nous voulons transformer notre majorité relative en majorité absolue sur la réforme des retraites », a martelé la porte-parole, sans s’engager sur le fait qu’Elisabeth Borne arriverait finalement de cette arme.
D’autant que ce scénario entraînerait de nouvelles difficultés, peut-être majeures, pour l’exécutif. Le recours à l’article 49.3 de la Constitution ne resterait pas sans réponse, et les députés de l’alliance de gauche Nupes, ceux du RN, voire les opposants aux autres formations, pourront déposer des motions de censure du gouvernement.
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Jordan Bardella, le président du parti d’extrême droite, a parlé dimanche de “discussions” à l’Assemblée sur une motion commune aux oppositions pour faire tomber le gouvernement, confirmant une hypothèse qui circule tranquillement depuis quelques jours. Comme souvent, les députés du petit groupe indépendant LIOT pourraient détenir les clés de cette affaire. ” C’est quelque chose à penser », assure l’un des députés, Paul Molac, à propos de cette motion transpartisane à la Télégramme. Un texte consensuel, qui aurait l’avantage de rassembler des voix d’horizons divers.
” Si 49.3 est utilisé, une motion de censure sera déposée et cette fois, elle a de fortes chances de passer », résumait ce week-end sur BFMTV le député EELV Aurélien Taché, pour qui, un brin optimiste, « Ce le gouvernement tombera. » Un scénario qui conduirait à de nombreuses réactions en chaîne. Mais c’est une autre histoire.
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