Réforme des retraites : le recours au 49.3 serait “dangereux”, prévient Laurent Berger

Utiliser l’article 49.3 pour la réforme des retraites constituerait ” une forme de vice démocratique ” à la fois ” incroyable et dangereux », prévient Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, dans un entretien accordé à la Journal du dimanche suite à son adoption au Sénat.

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Le texte a été approuvé après une nouvelle journée de protestations, lors d’un vote bloqué en vertu de l’article 44.3 de la Constitution, qui autorise un vote unique sur l’ensemble du projet de loi, sans mettre aux voix les amendements auxquels le gouvernement s’oppose. Si députés et sénateurs parviennent à un accord mercredi en commission paritaire, il pourrait être définitivement adopté le lendemain.

“Le Premier ministre [Elisabeth Borne] ne veut pas 49.3. Elle l’a dit. Il n’y a donc aucune raison pour que le gouvernement le fasse… Disons les choses : le débat n’a pas eu lieu à l’Assemblée nationale, et il a été accéléré au Sénat, alors que ce dernier a pour habitude d’aller jusqu’au bout de la textes dans une ambiance sereine. Dans ce contexte, adopter cette réforme grâce au 49.3 est impossible »juge Laurent Berger.

« Adopter via cette procédure précipitée une réforme à la fois très impactante pour la vie de dizaines de millions de personnes, injuste de notre point de vue et mal bricolée, serait une forme de vice démocratique »il continue. “Que la fin de l’histoire soit un 49.3 me paraît incroyable et dangereux”. Inversement, “si le Parlement vote le texte, mais c’est loin d’être fait, il faudra le constater”il reconnaît, tout en considérant que “en tout cas, tout le monde du travail rejette cette réforme”.

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“Un ressentiment très profond”

« Ce n’est pas la France des fainéants qui manifestent : c’est celle de ceux qui travaillent tous les jours, dans toutes les régions et tous les métiers ! Et la réponse du gouvernement, qui explique que la seule option est de faire passer la réforme coûte que coûte, c’est le mépris. C’est pourquoi la détermination qui s’exprime dans la rue se transforme en colère. Pour sortir de cette impasse, pourquoi ne pas demander aux citoyens ce qu’ils pensent du passage de 62 à 64 par référendum ? »

“La détermination qui s’exprime dans la rue”après sept jours de mobilisation et avant un huitième mercredi, “se transforme en colère”prévient le leader de la CFDT, pour qui « La contestation dans le monde du travail est massive, profonde et durable ». “Ce n’est pas parce que ce texte serait adopté que les gens vont se dire : “On passe à la séquence suivante”. C’est ce que croient les techniciens qui conseillent le gouvernement. Et ils ont tort. »

“Si la loi est adoptée sans tenir compte de l’expression du mouvement social, on ne se retrouvera pas, le lendemain matin, à discuter comme si de rien n’étaitil a prédit. Je ne cautionne jamais la violence. Après, ce sera peut-être une conséquence malheureuse face au mépris auquel nous sommes confrontés. Il y a un ressentiment très profond dans le monde du travail. »

Elisabeth Borne s’est félicitée samedi que le texte ait été adopté au Sénat “avec un large vote (…) malgré les tentatives d’obstruction de certains groupes ». “Je suis sûr qu’il y a une majorité au Parlement pour voter ce texte”elle a ajouté.

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Selon Patrick Kanner, président du groupe socialiste au Sénat, le gouvernement s’est mis en position “impasse tenace”. « Il n’y a pas de bonne solution pour le gouvernement car c’est une mauvaise réforme. (…) S’il y a 49.3 à l’Assemblée, la gauche déposera une motion de censure, mais nous ne mélangerons jamais nos votes avec les [Rassemblement national] »a-t-il annoncé sur l’antenne de BFM-TV.

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Le Monde avec AFP

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