Par ici. Non, plutôt là-bas… Il est 5 heures du matin et Stéphane Layani guide Emmanuel Macron dans les allées de son royaume, le plus grand marché de gros du monde, sur lequel il règne depuis plus de dix ans. Cheveux argentés, teint hâlé, le patron de Rungis attrape le président par le bras, dévie sa course, le pousse par les épaules. Les voici entre deux rangées de carcasses fraîches, les bouchers demandent un selfie. « Tu vois, tu es aimé ! »Layani rit.
” C’était super “, a remercié le chef de l’Etat. Pour lui, les visites au marché d’intérêt national de Rungis (Val-de-Marne) font partie des voyages les plus cool. Elle est balisée, quadrillée, vivifiante. Là, Emmanuel Macron n’est pas seulement entre les mains d’un entrepreneur qui nourrit Paris et sa région, mais d’un ami de plus de vingt ans, tactile, rieur, chaleureux. “Oui, c’est mon ami », confirme Stéphane Layani, fils de Pieds-noirs à la familiarité immédiate et à l’étreinte facile, aussi à l’aise avec un cariste qu’avec un président.
Le patron des plus grandes salles du monde est un ami dans l’ombre d’Emmanuel Macron. Leur proximité intrigue les initiés : dès sa prise de fonction, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, s’est renseigné sur « cet homme qui ressemblait à une énigme ». Naturellement prolifique, M. Layani écarte gentiment les questions lorsqu’il s’agit du chef de l’Etat : « Je ne veux pas de chichis. » Il a même réussi – un exploit – à ne figurer dans aucune des biographies consacrées au président.
Ce 21 février, c’était la quatrième fois qu’il recevait Emmanuel Macron, lui offrant un écrin pour défendre sa réforme des retraites en s’adressant à l’aube aux ” bon sens “ de la « Des Français qui travaillent tôt ». Cinq jours plus tard, le revoici sur les traces du chef de l’Etat au Salon de l’agriculture. Il veille également aux dîners de gala Choose France à Versailles. Partagez chaque janvier la galette des rois géante coupée par Emmanuel Macron à l’Elysée. Renvoie tous les 1ers-Mai pour une fête de la gastronomie – un “tradition millénaire remontant à Charles IX, lorsque le prévôt des marchands portait le muguet au roi”il récite avidement.
Leur rencontre remonte à dix-huit ans, à l’Inspection générale des finances. En 2005, Macron, 27 ans, fraîchement sorti de l’ENA, faisait partie des juniors. Layani, en mission d’inspection d’un an, a 45 ans et a déjà sa première vie derrière lui.
Ce sudiste a d’abord été fonctionnaire de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Mais à 31 ans, il ne veut plus être “le monsieur du contrôle économique”. Il change de cap et intègre l’ENA. Dans la promotion Léon Gambetta, il rencontre Franck Robine, futur directeur de cabinet de François Fillon à Matignon, et Nicolas Revel, proche d’Emmanuel Macron et futur directeur de cabinet de Jean Castex. Et toujours dans la classe de 1993, lui, ce fils Issu d’une famille juive du sud de l’Algérie, tombe éperdument amoureux d’une jeune Corrézienne, Marie-Anne Barbat, qu’il finit par épouser.
Il vous reste 74,39% de cet article à lire. Ce qui suit est réservé aux abonnés.