Le sujet inquiète au plus haut sommet de l’Etat. En février, les produits alimentaires ont augmenté de 14,5 % par rapport à l’an dernier, un niveau jamais vu depuis les années 1970, avec une inflation globale de 6,2 %. En pleine mobilisation contre la réforme des retraites, qui rassemble chaque semaine plusieurs centaines de milliers de personnes dans la rue, le gouvernement ne veut pas voir s’ouvrir un nouveau front de grogne.
C’est pourquoi le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a annoncé lundi 6 mars le lancement d’un “quartier anti-inflation”, c’est-à-dire “le niveau de prix le plus bas possible” sur une sélection de “des centaines” de produits dans les grandes chaînes de distribution. Un appareil qui coûtera “plusieurs centaines de millions d’euros” au secteur, a déclaré le ministre. Ce dernier a également annoncé l’expérimentation d’un “ bon repas » pour les ménages les plus en difficulté. Quels sont ces appareils ? A quels produits s’appliquent-ils ? Aperçu.
Qu’est-ce que le « trimestre anti-inflation » ?
L’accord conclu le 6 mars entre Bruno Le Maire et les représentants de la grande distribution prévoit que ces derniers s’engagent à facturer un assortiment de produits, laissé à leur gré, au prix “prix le plus bas possible” pour les consommateurs. Les distributeurs peuvent choisir la sélection, le nombre d’articles concernés, le niveau de rabais ainsi que la durée de l’opération. Pour beaucoup d’entre eux, le système commencera le 15 mars.
Certains ont pris les devants avant même les annonces du ministre de l’Economie. À partir de 1euh En février, Super U, par exemple, a lancé sa propre offre anti-inflation, c’est-à-dire « 150 produits à prix coûtant », c’est-à-dire en sacrifiant autant de marge que la loi le permet. Le PDG de Carrefour, Alexandre Bompard, a quant à lui présenté, le 5 mars, le dispositif de sa marque : 200 produits à 2 euros à partir du 15 mars et jusqu’en juin. Cela comprend 100 produits “du quotidien” – dont des couches pour bébés, de la pâte à tartiner, de la farine et même des biscuits – ainsi que 100 produits dits “sains”, à savoir des yaourts, des œufs, des légumes frais… Pour Intermarché, c’est « 500 produits anti-inflation “. Pour les casinos, “500 produits à moins d’1 euro et à prix fixe”.
Si les offres diffèrent d’un distributeur à l’autre, tous doivent néanmoins afficher un seul et même logo sur les produits sélectionnés : un autocollant tricolore mentionnant “quartier anti-inflationniste”. Selon les distributeurs, ces opérations commerciales concerneront principalement des produits à marque propre, propriété des marques et n’entrant pas dans le cadre de négociations annuelles avec les fabricants.
Certains distributeurs estiment toutefois en avoir déjà assez fait en proposant depuis plusieurs mois des produits à bas prix. « Nous frappons avec des opérations à prix coûtant. On casse les prix sur les masques, les autotests, les baguettes… Donc Leclerc n’a pas besoin d’un panier anti-inflation »a déclaré Michel-Edouard Leclerc le 6 mars. Il n’a pas participé à la rencontre entre les acteurs du secteur et le ministre de l’Economie, qui a eu lieu le même jour.
L’abandon du « panier anti-inflation »
LE “quartier anti-inflationniste” sur lequel le gouvernement et les grands détaillants se sont mis d’accord diffère de la “panier anti-inflation”, pour laquelle la ministre déléguée chargée des PME, Olivia Grégoire, avait d’abord plaidé. Ce « panier » devait être composé d’une cinquantaine de produits de première nécessité dont les prix auraient été bloqués pour toutes les marques. Cependant, cette initiative a suscité une forte opposition de la part des commerçants comme des agriculteurs, inquiets d’être victimes d’une guerre des prix.
L’association de consommateurs UFC-Que Choisir a critiqué le choix du gouvernement. “Pas de définition réglementaire” n’existe pas pour fixer le “prix le plus bas possible”, a rappelé sur France Bleu, le 6 mars, Olivier Andrault, responsable de la mission agriculture et alimentation de cette association. « Je crois au libre-échange. Nous ne pouvons pas bloquer les prix administrativement », a pour sa part affirmé Bruno Le Maire. “ Nous veillerons simplement à ce que les engagements pris par les distributeurs soient respectés », il ajouta. Il a notamment annoncé que les services de son ministère procéderaient à des contrôles dans les grandes surfaces.
La réouverture des négociations entre la grande distribution et les industriels
En échange de cela “quartier anti-inflationniste”les acteurs de la grande distribution ont obtenu du ministère de l’Économie que les négociations commerciales avec les fournisseurs de l’agro-industrie, qui se sont terminées le 1euh mars, sera relancé fin juin. Les dernières négociations ont abouti, dans la douleur, à une augmentation moyenne de quelque 10 % des prix payés par la grande distribution aux industriels pour tenir compte de l’augmentation de leurs coûts de production (énergie, transport, matières premières, emballages, etc.). “J’écrirai à tous les grands constructeurs, ceux qui ont le dos le plus fort, pour leur demander d’engager cette renégociation des prix avec la distribution”, a déclaré le ministre de l’Economie, citant comme argument la baisse du prix du blé ou celle du coût du fret maritime.
Expérimenter le “chèque alimentation”
Bruno Le Maire a également annoncé la création de“un bon d’alimentation pour les plus modestes”. C’était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron, déjà évoquée en décembre 2020 devant la Convention citoyenne pour le climat. Ce dispositif est censé permettre aux personnes en difficulté d’avoir accès à des produits alimentaires français de qualité. Il « se fera sur une base territoriale, probablement départementale »dit-il, assurant qu’un “l’expérimentation sera lancée dans les prochains mois”. Ce dispositif fera partie d’une enveloppe de 20 millions d’euros, destinée à la déclinaison locale du plan d’aide “mieux manger pour tous”.