Les premières étapes de l’évolution des organismes vivants n’ont cessé d’intriguer les scientifiques. Cependant, la découverte d’une nouvelle souche d’archées a permis aux chercheurs de faire un pas de plus vers la compréhension de l’origine des eucaryotes, cette vaste branche du vivant à laquelle nous appartenons.
L’arbre de vie est traditionnellement divisé en trois branches principales : les eubactéries ou vraies bactéries ; les archées, un autre groupe de micro-organismes unicellulaires ; et les eucaryotes. Ce dernier groupe, même s’il n’est pas le plus important, reste le plus étudié, car c’est le seul à avoir vu émerger la pluricellularité. Les eucaryotes, c’est-à-dire à la fois les humains et les algues ou champignons planctoniques, se distinguent par une architecture cellulaire complexe.
Une origine contestée
La caractéristique fondamentale des cellules eucaryotes est la présence d’un noyau, une poche délimitée par une double membrane contenant le matériel génétique. Mais elles possèdent aussi d’autres organites (structures spécialisées dans une fonction cellulaire donnée) comme les mitochondries (les usines énergétiques des cellules) et un réseau membranaire interne appelé réticulum endoplasmique. Enfin, elles sont équipées d’un cytosquelette d’actine, un réseau de protéines filamenteuses longues qui structurent et donnent forme aux cellules comme des câbles microscopiques.
Cependant, l’origine des eucaryotes reste débattue. Des données récentes issues de la phylogénétique, l’étude de la parenté entre espèces au cours de l’évolution, suggèrent que ce groupe est issu d’une lignée d’archées appelée “Asgard”. En effet, des centaines de gènes supposés être spécifiques aux eucaryotes se trouvent dans le génome d’Asgard. Pour expliquer cette étonnante relation, des chercheurs japonais avaient proposé en 2020 un modèle hypothétique selon lequel des eucaryotes seraient issus d’un Asgard ayant émis de longues protubérances membranaires (extensions de la cellule) qui, en fusionnant, auraient, d’une part, formé la différents compartiments membranaires internes et, d’autre part, comprenait une eubactérie à l’origine des mitochondries actuelles.
Validation du modèle
Jusque-là pourtant, les scientifiques ne parvenaient pas à valider ce modèle, peinant à isoler et donc à observer ces potentiels cousins. C’est désormais chose faite : des chercheurs de Vienne et de Zurich ont réussi à cultiver en laboratoire une souche d’Asgard à partir de sédiments marins slovènes. En observant ces cellules unicellulaires au microscope électronique, les chercheurs ont remarqué que l’Asgard émettait effectivement de longues protubérances membranaires bourgeonnantes. Plus intéressant encore, ils ont montré que ces protubérances étaient structurées par des filaments d’actine, similaires à ce que l’on pourrait observer chez un eucaryote. Cette architecture cellulaire complexe, inédite dans un non eucaryote, va bien dans le sens du modèle proposé par les chercheurs japonais.
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